lundi 3 novembre 2025

Josquin Des Prez, Tu solus qui facis mirabilia

Josquin Des Prez (1450-1455, peut-être à Beaurevoir (département de l'Aisne en région Hauts-de-France), mort à Condé-sur-l'Escaut (département du Nord, région Hauts-de-France) le 27 août 1521). 
— Tu solus qui facis mirabilia, en français Toi seul est celui qui fait des merveilles

samedi 1 novembre 2025

Danse - Le drapeau Palestien interdit aux Abbesses

Le public grimpe la rue Ravignan, en face du Théâtre des Abbesses, Photo Fabien Rivière 
Gush is Great, par Production Xx, Photo Fabien Rivière
Gush is Great, par Production Xx, Photo Fabien Rivière
.
Le Théâtre de la Ville à Paris présentait en septembre en son Théâtre des Abbesses cinq programmes consacrés aux résultats du Concours Danse élargie. Le concours se déroule depuis 2010 les années paires (20 projets de 10 minutes chacun), les résultats sont développés les années impaires. En 2025, nous y voici. 

Le 4° programme est composé de trois propositions qui ont pour points communs la transmission d'œuvres, à des élèves ou à des professionnel-le-s.

Il s'est ouvert par une pièce en plein air, Gush is Greatcréation de Production Xx, soit Julie Botet, Simon Le Borgne, Max Gomard, Philomène Jander, Zoé Lakhnati et Ulysse Zangs (présentations en fin d'article) en collaboration avec les 36 élèves du Conservatoire à Rayonnement Régional (CRR) de Paris - Ida Rubinstein (8° arrondissement), option Danse classique, jazz et contemporain, de la seconde à bac +3, qui ont entre 16 et 23 ans. 

La version originale, de 10 minutes réglementaires, a été proposée lors de l'édition 2024 du concours Danse élargie. Elle a obtenu le 2° prix du jury d'artistes et le prix du « Jury Jeunes », soit alors 19 élèves de ce même département danse du Conservatoire à Rayonnement Régional (CRR) de Paris - Ida Rubinstein, qui ont souhaité reprendre la pièce et la développer. 

Vers la fin de la performance, Photo Fabien Rivière

Nous écrivions : « (...) on observe un slow motion de 10 minutes du fond du plateau à son devant, une ligne d'interprètes face au public, qui va jeter par dessus bord si on ose dire, tout un tas d'objets dissimulés sous ses manteaux. C'est du mime, et "politiquement", pour répondre à un jury, c'est bien faiblard, sinon geignard, passif. » 

Fin de la performance, Photo Fabien Rivière

En septembre 2025, l'œuvre prend une toute autre ampleur. On observe les spectatrices et spectateurs nombreux, grimper la rue pentue en face du théâtre des Abbesses, et stopper un peu avant la place sur laquelle elle débouche. Ils entourent les interprètes qui prennent position au milieu de la rue, debout dans le sens de la descente. Ils vont marcher lentement un peu plus de 50 mètres, en 30 minutes. C'est "lent". Dans le programme, Production Xx fait état d'« une apparente lenteur. Apparente car en vérité il y a un vrai rythme et tout va beaucoup plus vite que ce qu'il n'y paraît. » Ils vont jeter au sol différents objets. En fin de course, ils vont se laisser tomber au sol et y demeurer un temps. 

Après les applaudissements, les membres de Production Xx vont se succéder dans la lecture d'un texte qui dénonce l'interdiction qui leur a été faite de déployer un drapeau Palestinien. Nous le publions in-extenso ci-dessous. Un extrait : « (...) nous tenions quand même et aussi à exprimer notre profonde inquiétude face à la décision qui a été prise d’interdire la présence du drapeau palestinien dans cette performance avec les élèves. Cette décision soulève des questions fondamentales sur la liberté d’expression artistique, sur le rôle de l’art dans la sphère publique, et sur les limites imposées à la représentation de la réalité politique, complexe, malgré le cadre institutionnel et scolaire autour de ce projet. Nous avions besoin de partager avec vous ces inquiétudes. (vifs applaudissements) » Selon une bonne source, l'interdiction argue de la présence de mineur-e-s. 

Le travail de répétition a duré trois semaines, au Carreau du Temple et à la Ménagerie de Verre. Il s'est agi de travailler « les états de corps », comme confié par un-e interprète. C'est bien, mais est-ce suffisant ? Comme si le corps pouvait répondre à tout. Aucune photographie vue, ou vidéo et film visionnés, ou de livres lus. Le réel est maintenu à distance (à une unique exception près, finalement interdite). Est mobilisé l'imaginaire de la manifestation, mais dans une énergie très sinon trop basse, qui fait penser plus à celle d'un enterrement. Pour un psychanalyste lacanien, cette action de laisser tomber des objets peut être comprise comme un impératif sinon un ordre : laissez tomber (toute lutte). On pourrait parler de corps - paysage, c'est-à-dire de corps intéressants à regarder, poétiques pourquoi pas, mais passifs. 

Dans la pratique avec des jeunes, on trouve à l'opposé par exemple le chorégraphe belge d'Anvers Jan Martens (avec des textes ; notre article L'adolescence sidérante de Jan Martens (« Passing the Bechdel Test »)) et le français de Marseille Christophe Haleb (observation et écoute ; voir le premier et le deuxième film de la série Éternelle jeunesse ; Éternelle jeunesse #1 Valence - Éternelle Jeunesse #2 Amiens), sans même parler de Dominique Bagouet (1951 - 1992) qui expliquait qu'il travaillait jadis avec des danseurs et dorénavant avec des êtres humains dansants.   

Première page, feuille en noir et blanc de format A4 scotchée sur les portes
de toutes les entrées d'immeubles de la rue, Photo Fabien Rivière
Seconde page, feuille en noir et blanc de format A4 scotchée sur les portes
de toutes les entrées d'immeubles de la rue, Photo Fabien Rivière

Personne n'a fait attention à ces deux feuilles en noir et blanc de format A4 scotchées sur les portes de toutes les entrées d'immeubles de la rue où a lieu la performance, pourtant très instructives. Nous les publions ci-dessus. Il s'agit d'un courrier d'un représentant de l'État, en l'espèce du Préfet de police adressé au Théâtre de la Ville (et du Théâtre de la Ville aux riverains et aux commerçants). Il indique au passage l'existence d'un Bureau de la voie publique, Section manifestations. Il rappelle la nécessité d'une autorisation de l'État pour qu'un groupe intervienne dans l'espace public. Surtout on notera l'intitulé du courrier, en majuscules : PROJET DE MANIFESTATION NON REVENDICATIVE SE DÉROULANT DANS L'ESPACE PUBLIC. Il y est question « d'une déambulation chorégraphiée avec des danseurs. » NON REVENDICATIVE est la catégorie choisie, qui a facilité l'obtention de l'autorisation. L'animation neutralise sinon annule la revendication ? 
Fabien Rivière 
— Programme 4, Focus Jeunes créateurs - Générations Danse élargie, Théâtre de la Ville au Théâtre des Abbesses, 19 et 20 septembre. En savoir +

NOUS AVONS PUBLIÉ : 

Julie Botet est passée par l'école du Centre Chorégraphique National (CCN) de Roubaix sous Carolyn Carlson puis Olivier Dubois. 
Simon Le Borgne est membre du Ballet de l'Opéra national de Paris, en congé.  
Max Gomard, a étudié au Conservatoire de Tours et Coline à Istres, puis a participé à cinq créations avec Thomas Lebrun, Fabrice Ramalingom, Alban Richard, Georges Appaix et Michel Kelemenis. 
Philomène Jander a étudié à P.A.R.T.S (Performing Arts Research and Training Studios) à Bruxelles.
Zoé Lakhnati est diplômée en danse classique du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse (CNSMD) de Lyon en 2019 et de P.A.R.T.S (Performing Arts Research and Training Studios) à Bruxelles en 2022. Danseuse interprète pour les chorégraphes Mette Ingvartsen et Leïla Ka et a travaillé en tant qu’assistante pour Robyn Orlin et Dimitri Chamblas. 
Ulysse Zangs est diplômé de l'École du Ballet de l'Opéra de Paris et de la Palucca Hochschule für Tanz à Dresde (Allemagne) avant de rejoindre la Dresden Frankfurt Dance Company, où il a joué jusqu'en 2019. Travaillant désormais en tant qu'artiste indépendant, il collabore avec des chorégraphes et metteurs en scène de théâtre tels que Benjamin Millepied, l'Allemand Ersail Mondtag, Simon Le Borgne, et d'autres. Il est aussi musicien. 

Avec Roman Bonilauri, Lili Bracq, Salma Chemin Katar, Junior Douville, Héloïse Gappin Schmitt, Antoine Quares, Constance Voarick, Laura Annede Leray, Bertille Blondel, Cloé Sahone Billot, Natacha Fine, Tiana Rajaomaria, Léa Baudoin, William Boulay Itela, Maud Duchene, Vadim Villagordo, Livia Bras Jacques, Wei Faham Lee, Meliza Naves Suarez, Leïla Jouishomme, Gabriel Camara Issa, Léon Gauthier, Sybille Hoffman, Noé Lavandier, Salomé Moreels, Ulysse Roy, Louise Scheidt, Cassandra Thevenin, Yoannagbo Niang, Apolline Gueguen Caillié, Valentine Humbert, Mia Orobio Besson Magdelain, Roman Ramanick Gallonde, Elinoa Sieradzki Sprung, Yamin Ruiz, Salomé Tratman, Juliette Floc’Hlay

INTERVENTION 
de membres de Production Xx à l'issue de la performance 

— (Intervention d’une jeune femme)

Bonjour à toutes et à tous, 

Merci d’avoir assisté à la seconde présentation de la version XXL de la création collective Gush is Great,  

Merci aux équipes du Théâtre de la Ville, merci aux équipes techniques et encadrants du Conservatoire, Merci aux élèves qui nous ont choisi l’année passée lors de Danse élargie (vifs applaudissements) faisant confiance à la fois au projet mais aussi aux élèves actuels qui ont su s’approprier et porter cette pièce avec force et engagement.

Vous avez pu voir cet après-midi la grande qualité des interprètes que nous tenions à remercier chacune et chacun pour leur investissement autour de ce projet de transmission (vifs applaudissements) 

 

— (Intervention d’un jeune homme) 

Merci donc à … euh … çà va être un peu long, mais vous avez l’habitude je pense avec ce qui vient d’arriver. Merci à [énonce tous les prénoms des interprètes] vous pouvez évidemment les applaudir (vifs applaudissements). On doit aller assez vite car le temps nous est compté, pour ceux qui vont continuer l’après-midi de spectacles [en salle] mais nous tenions quand même et aussi à exprimer notre profonde inquiétude face à la décision qui a été prise d’interdire la présence du drapeau palestinien dans cette performance avec les élèves. Cette décision soulève des questions fondamentales sur la liberté d’expression artistique, sur le rôle de l’art dans la sphère publique, et sur les limites imposées à la représentation de la réalité politique, complexe, malgré le cadre institutionnel et scolaire autour de ce projet. Nous avions besoin de partager avec vous ces inquiétudes.  (vifs applaudissements)  


— (Intervention d’une jeune femme)

Dans notre démarche, le drapeau n’est pas un simple emblème, il ne représente pas un mot d’ordre, mais un geste scénique porteur d’histoire de luttes, de silence et de fractures; Le convoquer dans une chorégraphie c’est ouvrir un espace de réflexion sur les corps en résistance et sur les territoires traversés par la violence et l’effacement. Empêcher l’apparition d’un symbole, en l’occurence celui d’un peuple exterminé par un régime autoritaire revient à nier une part de réalité, cela revient à taire une douleur. L’art, dans son essence n’est pas un espace neutre. Il interroge, dérange parfois, et c’est précisément là que réside sa nécessité. (vifs applaudissements) 


— (Intervention d’un jeune homme)

Nous affirmons que notre travail ne fait l’apologie d’aucune violence, il cherche au contraire à rendre visible les expériences souvent tues apportées aux corps marginalisés, et à ouvrir un espace poétique pour montrer la complexité de notre monde. L’art est un langage, la scène un lieu de liberté  symbolique. Restreindre les signes que les artistes peuvent y déployer revient à réduire cette liberté et à céder à une logique de contrôle politique sur la création. Nous refusons que la peur, la pression ou la neutralisation idéologique viennent restreindre le champ de ce qui peut être dansé. (applaudissements) 

 

— (Intervention d’un jeune homme)

Nous continuerons, avec responsabilité et exigence, à défendre notre liberté artistique, engagée, ouverte au dialogue, et ancrée dans la réalité de notre époque. Et nous remercions encore une fois les jeunes qui, avec nous, ont porté ces quelques mots essentiels. Merci.  (vifs applaudissements) 

lundi 27 octobre 2025

Brian Eno et Beatie Wolfe, Play On

Extrait de la collaboration entre Brian Eno et Beatie Wolfe pour l'album Luminal, publié en juin dernier. S'inscrit dans une série de trois albums : Luminal, Lateral et Liminal
POCHETTE DE L'ALBUM

dimanche 26 octobre 2025

Inauguration d'une salle Régis Huvier à la Maison des Métallos

Plaque Hommage à Régis Huvier, Maison des Métallos, Paris, Photo Fabien Rivière

Le projet de donner le nom d'un lieu à Régis Huvier (1966–1995), en hommage au danseur et chorégraphe contemporain mort du sida à 29 ans, a enfin abouti, qui plus est dans le quartier parisien où il vivait, le 11° arrondissement, trente ans après sa disparition. 

La première tentative avait échoué, en 2017, qui consistait à souhaiter donner son nom à la Maison des Pratiques Artistiques Amateurs, sise 17-19, rue Breguet (11° ardt), qui est un établissement culturel de la ville de Paris, et dont le nom actuel est MPAA/Breguet. Nous publions ci-dessous la délibération du conseil municipal de l'époque. 

Une salle Régis Huvier vient d'être inaugurée le vendredi 17 octobre dernier à la Maison des Métallos, un établissement culturel de la ville de Paris, situé dans le 11° arrondissement, actuellement dirigé par Alice Vivier depuis juin 2024  (ICI). 

Le projet inabouti et le réussi ont été portés en grande partie par Patrick Bloche, 69 ans, qui fut proche du défunt, membre du parti socialiste, premier adjoint à la Maire de Paris (1), adjoint à la Maire de Paris, ancien député (1997-2017) et ancien maire du 11° arrondissement (2008-2014). C'est aussi le président du conseil d'administration de la Maison des Métallos.  

Une exposition dans un café a été consacrée récemment au disparu dans son village natal, à l'initiative de sa nièce (précisions ci-dessous). 
Fabien Rivière
(1) Premier adjoint à la maire de Paris en charge de l’éducation, de la petite enfance, des familles, des nouveaux apprentissages, en charge du Conseil de Paris, des relations avec les arrondissements et de la transformation des politiques publiques et de toutes questions liées à l'Outre-mer. - Conseiller de Paris, Adjoint à la maire – Groupe Paris en commun 

MAISON DES MÉTALLOS
Communiqué de presse
MAISOMA
 « Le vendredi 17 octobre 2025 à 19h, la Maison des Métallos [Paris, 11° arrondissement] rend hommage au chorégraphe Régis Huvier (1966–1995) à l’occasion de l’inauguration officielle de la salle qui portera désormais son nom.

Cette dénomination, à l’initiative de Patrick Bloche, président du conseil d’administration de la Maison des Métallos et premier adjoint à la Maire de Paris, a été adoptée en concertation avec la Ville de Paris. Elle marque la volonté de saluer la mémoire d’une figure majeure de la danse contemporaine française et d’un artiste profondément attaché au 11e arrondissement, où il a vécu et créé jusqu’à sa disparition prématurée à l’âge de 29 ans, en 1995.

Formé auprès de chorégraphes tels que Marie-France Delieuvin, José Montalvo, Carolyn Carlson ou Jean-Claude Gallotta, Régis Huvier fonde en 1986 la compagnie L’Arrache-Cœur aux côtés de Joëlle Rollet et Véronique Rousseau. Par son écriture chorégraphique et littéraire, il incarne une génération d’artistes qui ont marqué la scène contemporaine, et dont nombre furent emportés par le SIDA dans les années 1980-90.

Cette inauguration, en présence d’élu·es de la Ville de Paris, de proches de Régis Huvier et de membres de sa compagnie, s’accompagnera d’une projection d’images et de films retraçant son parcours. À travers ce geste, la Maison des Métallos et la Ville de Paris souhaitent rendre hommage non seulement à l’artiste, mais aussi à l’esprit d’engagement et de création qui traversait son œuvre.

La salle 2, désormais salle Régis Huvier, rejoint ainsi la salle 1, inaugurée en 2011 et portant le nom de Cécile et Henri Rol-Tanguy, figures emblématiques de la Résistance. Toutes deux rappellent, chacune à leur manière, combien la Maison des Métallos demeure un lieu de mémoire, de culture et d’humanité au cœur du 11e arrondissement.  »

EXPOSITION


Par ailleurs, Le Pays Briard, nous apprend que 
« Le café associatif Le Bidule de Nogent-l’Artaud [90 km à l'est de Paris ; 2.089 habitants en 2022], dans l’Aisne [région Hauts-de-France] (...) propose du 24 septembre au 11 octobre 2025, une exposition rendant hommage à Régis Huvier 30 ans après sa disparition. Cet évènement retrace l’histoire et l’œuvre de ce chorégraphe à travers des éléments et des souvenirs. » Régis Huvier était « un enfant du terroir devenu danseur. » L'exposition est une initiative de sa nièce. 

UN PRÉCÉDENT INABOUTI

Délibération affichée à l'Hôtel de Ville 
et transmise au représentant de l'Etat 
le 16 mai 2017

CONSEIL DE PARIS

Conseil Municipal

Extrait du registre des délibérations 

--------

Séance des 9, 10 et 11 mai 2017

2017 V. 114 Vœu visant à ce que le nom de Régis HUVIER soit donné à la Maison des pratiques artistiques amateurs Breguet.

-------------

Le Conseil de Paris, siégeant en formation de Conseil municipal,

Considérant que Régis HUVIER, danseur et chorégraphe, né en 1966 dans une famille de viticulteurs de l’Aisne, a découvert dès l’âge de 12 ans, l’art auquel il a consacré sa vie grâce aux pratiques amateurs et notamment les stages de danse contemporaine de Françoise et Dominique Dupuy ;

Considérant que Régis HUVIER a suivi les cours de grands chorégraphes comme Marie-France Delieuvin, José Montalvo, Carolyn Carlson, Jean Gaudin et la formation des Rencontres internationales de danse contemporaine de Paris avant d’entrer, en 1987 au Centre national de danse contemporaine d’Angers ;

Considérant que Régis HUVIER a été danseur dans les compagnies de Jean Gaudin, Brigitte Farges et Jean-Claude Gallotta ;

Considérant que Régis HUVIER a créé son premier solo en 1986, à l’âge de 20 ans, et qu’il a fondé, la même année, sa compagnie L’Arrache Cœur ;

Considérant que Régis HUVIER a non seulement chorégraphié tous les spectacles de sa compagnie mais en a aussi signé les textes et les chansons ;

Considérant que Régis HUVIER est l’auteur de plusieurs chorégraphies dont les plus interprétées ont été et restent aujourd’hui : Tombés des nues (créée en 1987 à L’Etoile du Nord), Et ils barjottent (créée en 1992 lors des journées Danse dense de Pantin et primée aux Bancs d’essai internationaux en 1993), Cherche pas y a moi (prix de l’humour et de l’interprétation au Concours Volinine en 1993), T’es mort ou pas cap (créée et primée au Festival Dance Roads - Vivat d’Armentières en 1994), Maltitude (1995) ;

Considérant que Régis HUVIER est également l’auteur de plusieurs nouvelles dont Tombés des nues (1991), Aime et ses mille et une vies (1992), Doc Boc (1993) ;

Considérant que Régis HUVIER est prématurément décédé, le 24 octobre 1995, à l’âge de 29 ans, dans son appartement de la rue Richard Lenoir dans le 11e arrondissement, victime du sida comme tant d’artistes de sa génération ;

Sur proposition de François Vauglin, Patrick Bloche et des élus du groupe Socialiste et Apparentés,

Emet le vœu que :

- le nom de Régis HUVIER soit donné à la Maison des Pratiques Artistiques Amateurs, sise 17-19, rue Breguet (11e).

mercredi 15 octobre 2025

L'atelier A : Vincent Glowinski


« Chaque semaine ARTE et l'ADAGP* [Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques] vous font découvrir le travail d'un artiste à l'occasion de son actualité. En visitant son atelier, partez à la découverte des inspirations et des techniques de la nouvelle génération d'artistes contemporains. »
Créée en 1953, l'ADAGP est la société française de perception et de répartition des droits d'auteur dans le domaine des arts graphiques et plastiques.
    ARTE.tv · 21 oct. 2020
Révélation Art Urbain 2018
— Vincent Glowinski vit à Bruxelles (Belgique). 

lundi 13 octobre 2025

« Entre-Temps », la métamorphose de Philippe Decouflé

Entre-Temps, Photo Pierre Planchenault


Philippe Decouflé reçoit le public depuis le 9 octobre à la Villette à Paris à l’espace Chapiteaux, le long du canal de l’Ourcq, où il présente sa nouvelle création, Entre-Temps, pour une série de 14 représentations. Accueillir le public est chez lui un art, tonique et doux. Avant la représentation, dans la salle, au pied de la scène à gauche un DJ debout et de dos devant sa platine, balance du bon son, différent chaque soir, d'avant les années 90, comme par exemple The Clash, ou issu de West Side Story ou Grease. Devant le rideau de scène baissé, un homme en costume noir, cheveux poivre et sel, cravate noire avec motifs blancs, portant un loup se dandine en essayant de suivre le flot musical. Notre Fantomas se nomme Philippe Decouflé. 


La scène révèle au sol un parquet ancien comme celui d’une salle de bal. Quand on lève les yeux, c’est plutôt un château du temps du cinéma muet, vide, et hanté ? 


Concernant les neuf interprètes, on citera le danseur et chorégraphe Dominique Bagouet remarquant un jour qu’il travaillait jadis avec des danseurs, mais maintenant avec des êtres humains dansants. C’est ce qui frappe ici. D’ailleurs, il n’y a pas eu d’audition. Le chorégraphe a contacté les interprètes, expérimentés, de 40 à plus de 70 ans, qu’il connaît bien. Il déclare d’ailleurs : « Travailler avec des danseurs un peu plus mûrs, ça donne de la profondeur, ils ont une vraie personnalité sur scène. (…) Chez moi, ce qui est politique, c’est de montrer qu'un danseur de 70 ans, c'est extraordinaire. Il faut sortir des archétypes sur la beauté » (Sud Ouest, 10 avril 2025, ICI)


Il précise aussi un point important : « Mais après, c'est vrai que ce n'est pas mon truc de revendiquer des choses sur un plateau, je suis un saltimbanque et j'en suis content. J'aime cette dimension de divertissement. Il y a un trop grand écart entre le spectacle dit intelligent, culturel et le spectacle populaire. Le spectacle populaire tire trop sur des ficelles idiotes et le spectacle pointu refuse d'être spectaculaire. » (idem)   


Dominique Boivin dans Entre-Temps, Photo Jean Vermeulen

Il a aussi renouvelé son équipe qui l’entoure hors plateau, qu’il qualifiait lors de la précédente pièce, Stéréo, d‘« équipe exceptionnelle. On se connaît tous depuis des années », ne gardant que le décorateur Jean Rabasse. 


La passion de la musique est toujours présente, entre culture populaire et culture savante, avec Kraftwerk, The Doors, Supertramp, Madonna, Bach, Haydn, Liszt, Rameau (avec Gavotte en La Mineur), Prokofiev, Michel Legrand, Sébastien Lagrange, enregistrée ou jouée live par l’exceptionnel pianiste à la vitalité contagieuse Gwendal Giguelay. Il accompagne le cours de danse de Peter Goss du jeudi que suit Decouflé. 


Eric Martin, Visuel associé à Entre-Temps, par Olivier Simola


La danse est surprenante, dans son dépouillement, qui défend une humanité émouvante. On se croise, on écarte les bras doucement, et on n’a pas peur de se prendre dans les bras. De longues marches toniques. Et soudain un ‘’solo’’ sublime d’Eric Martin, sur les 8 minutes et 25 secondes du O Superman de Laurie Anderson, répétitif, follement sensuel et inquiet (album Big Science, en 1982). Il est suivi par un magnifique solo de Dominique Boivin sur le Knee 1 de la pièce de Bob Wilson Einstein on the Beach, musique de Philipp Glass. Decouflé a demandé au premier quelle musique avait changé sa vie. Il a proposé ce morceau et créé cette danse. Génie du danseur. Le second, danseur et chorégraphe, a ressuscité du matériel ancien. Il y a aussi ces danses populaires bretonnes, enivrantes.  


Catherine Legrand, Visuel associé à Entre-Temps, par Olivier Simola

Deux autres figures importantes de l’histoire de la danse contemporaine sont aussi de la partie. Catherine Legrand a débuté sa carrière d’interprète avec Dominique Bagouet, qu’elle accompagne de 1982 jusqu’à la fin tragique de ce dernier le 9 décembre 1992, et au-delà. Elle transmet sa danse, cette tenue si particulière du corps, ces bras qui s’élèvent vers le ciel avec tellement de douceur. Michèle Prélonge travaille avec Régine Chopinot, d’ailleurs présente le soir de la première, à partir de 1980 pendant six ans. Elle participe ainsi à la création de Halley’s comet, Appel d’air, Swim one, Grand écart, Délices, Via, Le défilé ou encore À La Rochelle, il n’y a pas que des pucelles. Depuis 2000, elle se considère comme une danseuse « épisodique et vintage ». Par exemple, elle prend en charge en 2002 les archives de Régine Chopinot dans le cadre du centre chorégraphique national de La Rochelle. 


La seconde partie mélange la lumière à l’ombre, la vie à la mort. Le temps passe, comme l’on dit, et on sait le chemin qui mène à quel but, radical. Le chorégraphe donne le sentiment d’avoir lâché prise, c’est-à-dire ayant enfin réussi à assumer sa face solaire et sa face inquiète. Il n’est plus le joyeux drille qui produit de l’entertainment. Pas de pathos ni de pathétique, cependant. La vie, simplement, et c’est bouleversant.  

Fabien Rivière

Vu le 9 octobre 2025

Entre-Temps, de Philippe Decouflé, espace Chapiteaux, La Villette, Paris, du 9 au 26 octobre 2025. En savoir + 


DISTRIBUTION : 

Conception et mise en scène Philippe Decouflé 

Assistante Violette Wanty 


De et avec Dominique Boivin, Meritxell Checa Esteban, Catherine Legrand, Éric Martin, Alexandra Naudet, Michèle Prélonge, Yan Raballand, Lisa Robert, Christophe Waksmann 

et au piano Gwendal Giguelay 

Avec la participation d’un groupe de volontaires amateurs 


Lumière direction technique Begoña Garcia Navas 

Décor Jean Rabasse assisté d’Aurélia Michelin 

Costumes Anatole Badiali 

Musiques originales Gwendal Giguelay, XtroniK, Guillaume Duguet 

Montage des voix Alice Roland 


Régie plateau Léon Bony 

Régie lumière Grégory Vanheulle 

Régie son et bruitages Guillaume Duguet 

Direction de production et coordination Frank Piquard 

Production Sarah Bosquillon, Jérémy Kaeser, Julie Viala, Jeanne Ferrante 

Régie générale Chaufferie Antoine Cherix 


Accessoires Lahlou Benamirouche 

Construction Guillaume Troublé, Léon Bony, Matthieu Bony 

Costumiers Jean Malo, Jean Baptiste, Arnaud Coeuff, Aurélie Conti 

Stagiaire Costumes Cécilia Bouchez 

Accessoires costumes Eugénie Delorme, Prisca Razafindrakoto 

Peinture Katia Siebert, David Nouyrit, Sylvie Mitault, Margot Gillot, Jean Lynch 

Couturières Décor Solange Comiti, Deborah Tuil 

Chauffeur Gilles Maron


TOURNÉE 2026 : 
— 7 - 9 janvier, MC2: Grenoble  En savoir +
— 15 - 17 janvier, Bonlieu Scène Nationale, Annecy  En savoir +
— 29 janvier - 1er février, anthéa Antipolis, Théâtre d’Antibes En savoir + 
— 25 - 28 février, La Comédie de Clermont-Ferrand  En savoir +
— 4 au 6 mars, Maison de la Culture d’Amiens  En savoir +
— 25 - 29 mars, Théâtre de Caen  En savoir +
— 16 - 17 avril, Théâtres de la Ville de Luxembourg  En savoir +

lundi 6 octobre 2025

Danse - Volmir Cordeiro fonce (« Parterre »)

Lucia Garcia Pulles dans Parterre, Photo Laurent Philippe

La première de la nouvelle création de Volmir Cordeiro, Parterre, s'est déroulée à la Briqueterie à Vitry-sur-Seine (94), dans le cadre de la 5° édition du festival Excentriques. On entre dans la salle du rez-de-chaussée par le bas, au niveau de la scène. Elle est presque vide. Un sentiment d'immensité, et de tranquillité, vous saisit. «Ça respire», se dit-on, comme si un immense bol d'air frais nous était offert. 

Un sol gris clair, traversé de quelques lignes droites ou courbes gris foncé. Au fond, une longue barre noire de la largeur du plateau, à deux mètres de haut, sur laquelle sont posés des vêtements dans des noirs, des blancs et des gris. Tout au fond aussi, une frêle jeune femme avance lentement et discrètement, des branchages réunis à la main droite, la tête et le buste penchés vers le sol souvent. Elle le frappe, ou son dos nu, sans violence. Elle va évoluer dans tout l'espace.  

Ainsi, vont se succéder, chacun ayant droit à un solo, Lucia Garcia Pulles, Volmir Cordeiro, Marius Barthaux, Elie Autin et Cassandre Moun. Il est important de les nommer tant la qualité de la danse et de leurs engagements sont impressionnants tout au long de la pièce. 

Dans ces solos, on repère donc qu'ils ont souvent la tête baissée mais sans que cela n'altère en rien leurs déterminations à aller de l'avant, et, pourquoi pas, leur dignité. Aller de l'avant comme un militaire qui progresse sur un terrain d'opération. Baisser la tête pour se faire discret, pour éviter les balles ennemies. On pense aussi à des petits personnages de BD, à des zoulous, à des zazous. 

Au bout de vingt minutes, la pièce est à un tournant. Les interprètes sont réunis, les bustes et plus largement les corps se tendent, dans une frontalité nouvelle. Ils sont habillés soudain comme à une cour de Louis XIV, mais à partir de matériaux de récupération, et pourtant forts élégants. Ils font société, au sens du jeu social et du contrôle social, grimaçants. Cependant, la pièce va défaire rapidement cet ordre pour retrouver et défendre un appétit féroce de liberté, enivrante, puissante, tourbillonnante, vitale. Les costumes sont signés Rubén Pioline Aronian avec la couturière Coco Blanvillain. On saluera la création sonore de Loup Gangloff, qui pulse.

Le chorégraphe explique dans une interview : « C'est ce parterre, tel qu'il était constitué dans la hiérarchie théâtrale du 18e siècle, où les personnes parlaient, mangeaient, buvaient, se retrouvaient autour d'une expérience sociale. J’ai aussi un tropisme pour le comportement carnavalesque et la joie participative, qu’on active en abolissant la hiérarchie sociale, et qui a à voir avec une forme d’égalité spatiale puisque les corps se mélangent en un même lieu du débat, du tumulte. »  Il défend ce qu'il nomme « une gestuelle de l’indiscipline. » (ICI)

Construction rigoureuse, pour une proposition réjouissante, exigeante tout en étant populaire, de quoi ravir un public de 7 à 107 ans. 
Fabien Rivière 

Parterre, de Volmir Cordeiro, La Briqueterie - Centre de Développement Chorégraphique National (CDCN) du Val-de-Marne, Vitry-sur-Seine, dans le cadre du festival Excentriques (25/09 au 11/10), du 1 au 3 octobre, vu le 2 octobre.  En savoir +

TOURNÉE : 
— Mardi 7 et mercredi 8 octobre 2025 - Friche La Belle de Mai, Festival ActOral - festival des arts et des écritures contemporaines, MarseilleEn savoir + 
— 28 mars 2026 - Le Dancing CDCN (Centre de développement chorégraphique national), au Parvis Saint Jean, Dijonwww.ledancing.com 
— Mardi 28 et 29 avril 2026 - Théâtre Olympia - CDN (Centre dramatique national) Tours avec le CCN (Centre chorégraphique national) de Tours.  En savoir +