mardi 1 décembre 2015

Anne Nguyen - Lettre ouverte - le DNSPD de danse hip-hop : quels enjeux, quelle reconnaissance ?

Le Ministère de la Culture et de la Communication porte actuellement le projet de créer un Diplôme national supérieur professionnel de danseur (DNSPD) en danse hip hop

Cette initiative est contestée par une partie du milieu hip hop. Nous avons publié récemment Le Moovement contre le diplôme national supérieur professionnel (DNSP) de danseur hip hop (suite)

Il existe aussi depuis le 11 novembre le texte Le DNSP pour les Nuls (version #Striter) ICI. On doit voir par ailleurs la vidéo sur sa page Facebook, de Babson Baba Sy, du 28 novembre ICI et 29 novembre ICI, et avoir connaissance de la réunion de discussion organisée le 30 novembre à 19h30 à Mains d'Oeuvres (Saint-Ouen), salle Star Trek.

Nous publions ci-dessous des extraits de la Lettre ouverte adressée à Madame la ministre de la Culture : le DNSPD de danse hip-hop : quels enjeux, quelle reconnaissance ? rédigée par la danseuse et chorégraphe hip hop Anne Nguyen, datée du 30 novembre 2015, sous la forme d'une pétition à signer. 
Fabien Rivière

PS. Au sujet du DNSPD tel qu'il existe déjà, on peut lire la note rédigée en janvier 2015 par le Centre National de la Danse. ICI  (fichier Pdf, 16 pages) 

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Le DNSPD de danse hip-hop : quels enjeux, quelle reconnaissance ?
Madame la Ministre,
La danse hip-hop a des similitudes avec la danse classique : elle est extrêmement technique et s’appuie sur de nombreux pas de base qui portent une histoire et donnent des repères à ses différentes gestuelles. La danse hip-hop est aussi une danse contemporaine, en ce sens qu’elle a pour principe fondateur et moteur la réinvention, la réappropriation du patrimoine culturel existant, le détournement des formes. Les danseurs hip-hop se réinventent chaque jour, ils font évoluer la danse et leur danse, en développant sans cesse de nouveaux mouvements, en créant de nouveaux styles de danse, en allant toujours plus loin dans la recherche d’un style unique et personnel. La danse hip-hop, grâce à cet esprit d’ouverture et de recherche, est en constante évolution et enrichit chaque jour son répertoire de nouveaux pas de base, de nouvelles gestuelles. Le danseur hip-hop est en perpétuelle recherche, il se différencie de tous les autres danseurs par sa manière d’exécuter les mouvements, de les conjuguer, de leur insuffler son propre style.
La danse hip-hop relève ainsi d’une certaine forme d’académisme (NDLR : « une Académie désignant aujourd'hui une assemblée de personnes élevées au rang d'érudits, de savants et d'artistes reconnus par leurs pairs dans leurs disciplines ; ces dites assemblées ayant pour rôle de promouvoir leurs disciplines, tout en veillant aux règles, codes et usages qui leur sont propres. »). Elle relève plus précisément d’une forme d’académisme qui par essence, prône l’évolution, la transformation, la réappropriation, et rejette l’imitation. Le geste hip-hop est habité, il naît d’instincts et de principes fondamentaux sans lesquels toute forme trop facilement reproduite n’est qu’enveloppe vide.
Peu importe la manière par laquelle on vient à la danse hip-hop. Lorsqu’on la pratique de manière assidue et poussée, en se confrontant à sa difficulté technique et à ses principes fondamentaux forts, on développe une grande sensibilité au mouvement, un goût de créer et de décliner, un besoin de développer la forme de la danse elle-même. Que l’on s’y consacre exclusivement ou que l’on ait en parallèle une pratique de la scène, les événements rassembleurs comme les entraînements, les battles ou les soirées, où la danse se pratique dans les cercles, sont des éléments fondateurs et moteurs dans l’accomplissement du danseur hip-hop. On y partage sa danse avec une communauté, on y improvise sur les rythmes d’un patrimoine musical riche et toujours grandissant, on s’y confronte à la nouveauté, on y acquiert et on y entretient la force de se dépasser, on s’y construit une identité. C’est sur ce terrain, dans ce terreau en perpétuelle évolution que vit une forme d’académisme implicite : les danseurs hip-hop se reconnaissent, savent pointer l’excellence et la nouveauté.
Tout comme pour la danse jazz, sous l’appellation généraliste de danse hip-hop se regroupent une vingtaine de styles de danse différents, tous issus de danses de club et puisant leur essence dans la musique. Break, popping, locking, house dance, hip-hop new style, hype, waacking, etc. sont des danses à part entière, des gestuelles bien spécifiques inspirées par des styles de musique différents, possédant chacune leur vocabulaire, leur énergie, leurs bases rythmiques, leurs principes propres et distincts. Ces différentes esthétiques sont nées, se sont développées – parfois en parallèle – et continuent à évoluer sur différents territoires, plus ou moins emblématiques, qui ont chacun apporté des éléments novateurs et des interprétations singulières ; chaque danseur hip-hop offre ainsi sa propre synthèse d’un héritage complexe. Mais même s’il connaît souvent quelques bases dans plusieurs de ces nombreuses esthétiques, il est généralement spécialiste d’une seule, ou, plus rarement, de plusieurs d’entre elles. Il lui est impossible de toutes les maîtriser techniquement, et encore moins de leur apporter sa propre touche, de leur donner vie. Car si c’est en intégrant idées et contraintes à sa danse que le danseur la fait évoluer, c’est en mettant en application les principes inhérents à sa discipline de prédilection qu’il déploie son propre style. 
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