samedi 31 mars 2012

Tunis : des comédiens agressés par des salafistes

« Le 25 mars 2012, l'Association Les ressortissants des instituts d'arts dramatiques organise devant le Théatre municipal de Tunis, l'événement Le peuple veut du théâtre, dans le cadre de la journée mondiale du Théâtre. Ils sont violemment pris à parti par des groupes extrémistes.

Au cours d'un entretien accordé à radioexpressfm.com, Moez M'rabet, président de l'association, a relevé la violence dont ils ont été victimes et a déploré l'absence de la police aux alentours du théatre. Selon lui, "la journée du Dimanche 25 mars 2012, restera une journée noire dans l'histoire du théâtre tunisien". » 

« Commentaire de la vidéo :
Les Salafistes empêchent les acteurs professionnels, amateurs, de présenter sur l'Avenue Bourguiba et devant le Théâtre Municipal de Tunis leur spectacle qui devait célébrer la naissance du théâtre en Tunisie dans les années 1900. Insultés (singes, débiles, laïcs, juifs, saletés), et après que la police se soit manifestée tardivement, les acteurs ont été se protéger à l'intérieur du théâtre. Rendez-vous le 1er avril, même heure, même endroit..... »
       SOURCE : www.radioexpressfm.com (Radio Express FM - Tunisie)
       ET La lettre d'information d'Africultures (www.africultures.com), semaine n° 14, 2012.

Témoignage de Leena Ben Mhenni : « J'étais avec les artistes devant le théâtre municipal, les policiers nous ont menacés de nous laisser à la merci des extrémistes. Des extrémistes ont réussi à casser les cordons des policiers et se sont attaqués à nous. Certaines personnes, dont moi ont réussi à quitter l’endroit, d'autres sont entrés dans le théâtre. Ils sont attaqués par des groupes d'extrémistes qui veulent forcer les portes. La police a laissé dégénérer pour des raisons obscures. »  SOUCE : ICI

Menaces contre les Juifs lors d'une manifestation islamiste à Tunis, non signé, Associated Press, 25 mars 2012. ICI 

VIDÉO 
Interview de Manel Abdelkoui, 
vice-présidente de l'Association Les Ressortissants Des Instituts d’Art Dramatique, avant la manifestation. ICI   

jeudi 29 mars 2012

La Métamorphose de Mikhaïl Rudy

                                                                                                                                 

Le pianiste Mikhaïl Rudy, dont on peut suivre la carrière et les traces discographiques chez EMI (de l'intégrale des concertos de Rachmaninov ou de Chostakovitch aux préludes de Chopin, en passant par l’anthologie des œuvres pour piano de Liszt, un cycle Beethoven, un de Scriabine, les œuvres de Tchaïkovski, des thèmes et variations de Haendel ou de Schumann, les Tableaux d'une Exposition de Moussorgsky, les sonates de Grieg et de César Franck, Le Carnaval des animaux de Saint-Saëns, des pièces de Messiaen, le Petrouchka de Stravinski, l’œuvre pour piano de Ravel, Schubert et Janáček) a évolué, changé, pour ne pas dire muté. Après avoir joué Wagner au piano, interprété Brahms au côté de Michel Portal, il n’a pas voulu se limiter pas au répertoire romantique ou néo-classique qu’il a servi et continue de servir avec une ferveur mêlant puissance et justesse, lyrisme et clarté expressive, et s’est aventuré dans le domaine jazzistique avec son alter ego Misha Alperin, se produit volontiers en banlieue (à la Maison de la Musique de Nanterre animée par Dominique Laulanné, entre autres), a collé en 2010 les tableaux musicaux de Moussorgsky à ceux peints à partir de ce même thème en 1928 par Kandinsky, puis de proposer et d’obtenir de la Cité de la Musique une commande audiovisuelle spéciale avec des images signées Stephen et Timothy Quay sur la sonate « 1er octobre 1905 » de Janáček, produite en direct live par le musicien à son clavier, à partir de la Métamorphosenon pas celle d’Ovide mais de Kafka.
IMAGINATION D'UN INTERNAUTE :
Mikhail Rudy joue la 8° sonate d'Alexandre Scriabine pour Pound Way de Merce Cunningham


Après une première partie apéritive juxtaposant trois morceaux (judicieusement) choisis, La Lugubre gondole n°2 de Liszt, enchaînée à La Mort d’Isolde de Wagner (revu et corrigé par le compositeur hongrois) puis, après une fausse sortie du soliste, la Sonate en si mineur de ce même Liszt, une œuvre d’une rare difficulté technique, tout en contrastes, en chassés croisés de différentes vitesse et puissance, tout en nuances et accélérations, en échappées belles à partir de quelques leitmotiv ou idées fixes à la Berlioz (dont Liszt transcrivit pour le piano ou « arrangea » à sa manière, précisément, La Symphonie fantastique), que Rudy joue avec tenue et retenue, l’air et mine de rien, droit comme un pape, sans cambrure ni apprêt, sans courbure ni affectation, très simplement, en fait et, donc, avec virtuosité, on est passé à la choses sérieuse, à La Chose, en l’occurrence la blatte, le scarabée, la Cucaracha du jeune Kafka.

Ce sont donc les frères Quay qui se sont adaptés et à la composition tonale et discontinue de Janáček, dont la beauté n’a pas pris une ride et a gardé son brillant éclat d’origine, œuvre hantée par la mort (dédiée à la mémoire de l’ouvrier František Pavlik tué par la police lors d’une manifestation à Brno), comme, du reste, l’œuvre de son compatriote et contemporain Kafka. Et non pas l’inverse. Même s’il nous a semblé qu’en lieu et place d’une partition, Mikhaïl Rudy a disposé un retour vidéo sur une mini-tablette électronique lui permettant de s’ajuster à la fin de chacune des cinq séquences filmiques (si on a bien compté).

Le résultat est probant, bien que les Brothers Quay aient limité la portée de la fable, métaphore ou parabole universelle qu’est Die Verwandlung [La Métamorphose], une nouvelle au départ typiquement pragoise, publiée une dizaine d’années après la sonate de Janáček (à un moment, en partie, reniée par celui-ci, sauvegardée par la pianiste qui la créa), en lui donnant un sens à la fois précis (malgré le flou assumé des images, la mise en boucle gestuelle, le film est nettement narratif) et assez différent de l’original : le conflit œdipien père-fils, proprement kafkaïen, étant selon nous estompé (gémellité oblige ?!), par le rapport fraternel, pour ne pas dire incestueux, entre l’homme cafardeux et sa sœurette, interprétée par la photogénique Kamila Kuc. ◯  Nicolas Villodre

Ciné-concert Mikhaïl Rudy - The Quay Brothers - Kafka : la Métamorphose, Cité de la Musique (Paris), le 21 mars 2012, 20h. Télécharger le programme (format pdf, 16 pages)

Marguerite Duras, Autoportrait








Une interview de Marguerite Duras tirée de Le ravissement de la parole, entretiens avec Jean-Marc Turine, 4 CD inédits et un livret, réédité en 2010, Harmonia Mundi (INA [Institut National de l'Audiovisuel], Radio France).