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mercredi 15 octobre 2025
L'atelier A : Vincent Glowinski
lundi 13 octobre 2025
« Entre-Temps », la métamorphose de Philippe Decouflé
Entre-Temps, Photo Pierre Planchenault |
Philippe Decouflé reçoit le public depuis le 9 octobre à la Villette à Paris à l’espace Chapiteaux, le long du canal de l’Ourcq, où il présente sa nouvelle création, Entre-Temps, pour une série de 14 représentations. Accueillir le public est chez lui un art, tonique et doux. Avant la représentation, dans la salle, au pied de la scène à gauche un DJ debout et de dos devant sa platine, balance du bon son, différent chaque soir, d'avant les années 90, comme par exemple The Clash, ou issu de West Side Story ou Grease. Devant le rideau de scène baissé, un homme en costume noir, cheveux poivre et sel, cravate noire avec motifs blancs, portant un loup se dandine en essayant de suivre le flot musical. Notre Fantomas se nomme Philippe Decouflé.
La scène révèle au sol un parquet ancien comme celui d’une salle de bal. Quand on lève les yeux, c’est plutôt un château du temps du cinéma muet, vide, et hanté ?
Concernant les neuf interprètes, on citera le danseur et chorégraphe Dominique Bagouet remarquant un jour qu’il travaillait jadis avec des danseurs, mais maintenant avec des êtres humains dansants. C’est ce qui frappe ici. D’ailleurs, il n’y a pas eu d’audition. Le chorégraphe a contacté les interprètes, expérimentés, de 40 à plus de 70 ans, qu’il connaît bien. Il déclare d’ailleurs : « Travailler avec des danseurs un peu plus mûrs, ça donne de la profondeur, ils ont une vraie personnalité sur scène. (…) Chez moi, ce qui est politique, c’est de montrer qu'un danseur de 70 ans, c'est extraordinaire. Il faut sortir des archétypes sur la beauté » (Sud Ouest, 10 avril 2025, ICI)
Il précise aussi un point important : « Mais après, c'est vrai que ce n'est pas mon truc de revendiquer des choses sur un plateau, je suis un saltimbanque et j'en suis content. J'aime cette dimension de divertissement. Il y a un trop grand écart entre le spectacle dit intelligent, culturel et le spectacle populaire. Le spectacle populaire tire trop sur des ficelles idiotes et le spectacle pointu refuse d'être spectaculaire. » (idem)
Dominique Boivin dans Entre-Temps, Photo Jean Vermeulen |
Il a aussi renouvelé son équipe qui l’entoure hors plateau, qu’il qualifiait lors de la précédente pièce, Stéréo, d‘« équipe exceptionnelle. On se connaît tous depuis des années », ne gardant que le décorateur Jean Rabasse.
La passion de la musique est toujours présente, entre culture populaire et culture savante, avec Kraftwerk, The Doors, Supertramp, Madonna, Bach, Haydn, Liszt, Rameau (avec Gavotte en La Mineur), Prokofiev, Michel Legrand, Sébastien Lagrange, enregistrée ou jouée live par l’exceptionnel pianiste à la vitalité contagieuse Gwendal Giguelay. Il accompagne le cours de danse de Peter Goss du jeudi que suit Decouflé.
Eric Martin, Visuel associé à Entre-Temps, par Olivier Simola |
La danse est surprenante, dans son dépouillement, qui défend une humanité émouvante. On se croise, on écarte les bras doucement, et on n’a pas peur de se prendre dans les bras. De longues marches toniques. Et soudain un ‘’solo’’ sublime d’Eric Martin, sur les 8 minutes et 25 secondes du O Superman de Laurie Anderson, répétitif, follement sensuel et inquiet (album Big Science, en 1982). Il est suivi par un magnifique solo de Dominique Boivin sur le Knee 1 de la pièce de Bob Wilson Einstein on the Beach, musique de Philipp Glass. Decouflé a demandé au premier quelle musique avait changé sa vie. Il a proposé ce morceau et créé cette danse. Génie du danseur. Le second, danseur et chorégraphe, a ressuscité du matériel ancien. Il y a aussi ces danses populaires bretonnes, enivrantes.
Catherine Legrand, Visuel associé à Entre-Temps, par Olivier Simola |
Deux autres figures importantes de l’histoire de la danse contemporaine sont aussi de la partie. Catherine Legrand a débuté sa carrière d’interprète avec Dominique Bagouet, qu’elle accompagne de 1982 jusqu’à la fin tragique de ce dernier le 9 décembre 1992, et au-delà. Elle transmet sa danse, cette tenue si particulière du corps, ces bras qui s’élèvent vers le ciel avec tellement de douceur. Michèle Prélonge travaille avec Régine Chopinot, d’ailleurs présente le soir de la première, à partir de 1980 pendant six ans. Elle participe ainsi à la création de Halley’s comet, Appel d’air, Swim one, Grand écart, Délices, Via, Le défilé ou encore À La Rochelle, il n’y a pas que des pucelles. Depuis 2000, elle se considère comme une danseuse « épisodique et vintage ». Par exemple, elle prend en charge en 2002 les archives de Régine Chopinot dans le cadre du centre chorégraphique national de La Rochelle.
La seconde partie mélange la lumière à l’ombre, la vie à la mort. Le temps passe, comme l’on dit, et on sait le chemin qui mène à quel but, radical. Le chorégraphe donne le sentiment d’avoir lâché prise, c’est-à-dire ayant enfin réussi à assumer sa face solaire et sa face inquiète. Il n’est plus le joyeux drille qui produit de l’entertainment. Pas de pathos ni de pathétique, cependant. La vie, simplement, et c’est bouleversant.
Fabien Rivière
Vu le 9 octobre 2025
Entre-Temps, de Philippe Decouflé, espace Chapiteaux, La Villette, Paris, du 9 au 26 octobre 2025. En savoir +
DISTRIBUTION :
Conception et mise en scène Philippe Decouflé
Assistante Violette Wanty
De et avec Dominique Boivin, Meritxell Checa Esteban, Catherine Legrand, Éric Martin, Alexandra Naudet, Michèle Prélonge, Yan Raballand, Lisa Robert, Christophe Waksmann
et au piano Gwendal Giguelay
Avec la participation d’un groupe de volontaires amateurs
Lumière direction technique Begoña Garcia Navas
Décor Jean Rabasse assisté d’Aurélia Michelin
Costumes Anatole Badiali
Musiques originales Gwendal Giguelay, XtroniK, Guillaume Duguet
Montage des voix Alice Roland
Régie plateau Léon Bony
Régie lumière Grégory Vanheulle
Régie son et bruitages Guillaume Duguet
Direction de production et coordination Frank Piquard
Production Sarah Bosquillon, Jérémy Kaeser, Julie Viala, Jeanne Ferrante
Régie générale Chaufferie Antoine Cherix
Accessoires Lahlou Benamirouche
Construction Guillaume Troublé, Léon Bony, Matthieu Bony
Costumiers Jean Malo, Jean Baptiste, Arnaud Coeuff, Aurélie Conti
Stagiaire Costumes Cécilia Bouchez
Accessoires costumes Eugénie Delorme, Prisca Razafindrakoto
Peinture Katia Siebert, David Nouyrit, Sylvie Mitault, Margot Gillot, Jean Lynch
Couturières Décor Solange Comiti, Deborah Tuil
Chauffeur Gilles Maron
lundi 6 octobre 2025
Danse - Volmir Cordeiro fonce (« Parterre »)
dimanche 5 octobre 2025
« Parterre » de Volmir Cordeiro
Parterre, Photo Laurent Philippe |
Le parterre avait à l’origine le sens de sol, de plancher, avant de désigner, selon l’Académie, la partie d’une salle de spectacle située entre les fauteuils d’orchestre et le fond du théâtre. La notion englobe, connote ou contamine celles de parquet, plate-bande, verdure, pelouse, massif, carré, boulingrin. Au sens large, le mot désigne l’orchestre, les stalles, la galerie, donc aussi le spectateur. Lequel était au départ debout et, de nos jours, assis mais non en lieu et place du prince. Le parterre peut être de buis, de gazon ou de fleurs. Paradoxalement, il arrive qu’il soit aquatique puisqu’on emploie parfois l’expression parterre d’eau pour qualifier un bassin. En Espagne, on lui préfère le solide et on parle de macizo (de massif). Au Brésil, on utilise l’expression canteiro de flores si bien que, dans sa note d’intention, Volmir Cordeiro exprime le désir de « faire émerger un jardin de couleurs et de parfums capable de nous rendre ensemble et confiants ». Que cent fleurs s’épanouissent, donc, pour paraphraser Mao.
Ce rêve éveillé de Volmir Cordeiro débute un peu comme le conte Cendrillon de Perrault et de Grimm – thème qui a inspiré les chorégraphes, de Louis-André Duport à Jean-Christophe Maillot, en passant par Petipa-Ivanov-Cecchetti, Laban, Fokine, Ashton, Gsovski, Noureev, etc. Tandis que s'installe l’assistance, une interprète, déjà dans la place, Lucia García Pulles, vêtue d’un jupon bleu en matière plastique conçu par Rubén Pioline Aronian et cousu par Coco Blanvillain, balaie consciencieusement le plateau au moyen d’un branchage cueilli, peut-on penser, dans le jardin de la Briqueterie – tout théâtre a son parterre, sa cour et son jardin. Des marques au sol rappellent celles qui ornaient le parquet du palais des Sports pour IXe Symphonie (1964) de Béjart. Ces cercles, triangles, lignes et signes n’ont rien de cabalistique, rien à voir avec un culte orisha. Elles évoquent la géométrie du jardin à la française, ainsi que le précise le chorégraphe. Avec la longue patère au fond du parterre où pendent des vêtements colorés, pauvres et baroques à la fois, ces traces grises sur PVC clair composent la scénographie d’Hervé Cherblanc.
Après l’extinction des lumières de salle, entrent en jeu les feux du spectacle sous le contrôle d’Éric Wurtz. Et entre en scène le danseur-chorégraphe en personne. À l’admirable variation en forme de prestation de service de Lucia García Pulles, succède un solo délicat de Volmir Cordeiro qui, usant d’une serpillère pour accessoire, parachève le nettoyage de la moindre particule de terre. La bande-son percussive et festive de Loup Gangloff monte de plusieurs degrés et dizaines de décibels. Trois autres performances individuelles se suivent sans se ressembler : celle, technique et athlétique de Marius Barthaux, celle, élégante et indolente, d’Élie Autin, celle, déliée et gracieuse de Cassandre Moun. Sans transition, sans pas de deux ou de plus, on passe au deuxième acte de la pièce, constitué d’un travail d’ensemble. En d’autres termes – ceux du programme –, « les cinq singularités s’imbriquent, se combinent. » La géométrie terre à terre triomphe de toute hiérarchie sociale. Volmir Cordeiro considère le théâtre comme « un espace intrinsèquement démocratique ».
Nicolas Villodre
Parterre, de Volmir Cordeiro, La Briqueterie - Centre de Développement Chorégraphique National (CDCN) du Val-de-Marne, Vitry-sur-Seine, dans le cadre du festival Excentriques (25/09 au 11/10), du 1 au 3 octobre, vu le 3 octobre. En savoir +
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