La première de la nouvelle création de Volmir Cordeiro, Parterre, s'est déroulée à la Briqueterie à Vitry-sur-Seine (94), dans le cadre de la 5° édition du festival Excentriques. On entre dans la salle du rez-de-chaussée par le bas, au niveau de la scène. Elle est presque vide. Un sentiment d'immensité, et de tranquillité, vous saisit. «Ça respire», se dit-on, comme si un immense bol d'air frais nous était offert.
Un sol gris clair, traversé de quelques lignes droites ou courbes gris foncé. Au fond, une longue barre noire de la largeur du plateau, à deux mètres de haut, sur laquelle sont posés des vêtements dans des noirs, des blancs et des gris. Tout au fond aussi, une frêle jeune femme avance lentement et discrètement, des branchages réunis à la main droite, la tête et le buste penchés vers le sol souvent. Elle le frappe, ou son dos nu, sans violence. Elle va évoluer dans tout l'espace.
Ainsi, vont se succéder, chacun ayant droit à un solo, Lucia Garcia Pulles, Volmir Cordeiro, Marius Barthaux, Elie Autin et Cassandre Moun. Il est important de les nommer tant la qualité de la danse et de leurs engagements sont impressionnants tout au long de la pièce.
Dans ces solos, on repère donc qu'ils ont souvent la tête baissée mais sans que cela n'altère en rien leurs déterminations à aller de l'avant, et, pourquoi pas, leur dignité. Aller de l'avant comme un militaire qui progresse sur un terrain d'opération. Baisser la tête pour se faire discret, pour éviter les balles ennemies. On pense aussi à des petits personnages de BD, à des zoulous, à des zazous.
Au bout de vingt minutes, la pièce est à un tournant. Les interprètes sont réunis, les bustes et plus largement les corps se tendent, dans une frontalité nouvelle. Ils sont habillés soudain comme à une cour de Louis XIV, mais à partir de matériaux de récupération, et pourtant forts élégants. Ils font société, au sens du jeu social et du contrôle social, grimaçants. Cependant, la pièce va défaire rapidement cet ordre pour retrouver et défendre un appétit féroce de liberté, enivrante, puissante, tourbillonnante, vitale. Les costumes sont signés Rubén Pioline Aronian avec la couturière Coco Blanvillain. On saluera la création sonore de Loup Gangloff, qui pulse.
Le chorégraphe explique dans une interview : « C'est ce parterre, tel qu'il était constitué dans la hiérarchie théâtrale du 18e siècle, où les personnes parlaient, mangeaient, buvaient, se retrouvaient autour d'une expérience sociale. J’ai aussi un tropisme pour le comportement carnavalesque et la joie participative, qu’on active en abolissant la hiérarchie sociale, et qui a à voir avec une forme d’égalité spatiale puisque les corps se mélangent en un même lieu du débat, du tumulte. » Il défend ce qu'il nomme « une gestuelle de l’indiscipline. » (ICI)
Construction rigoureuse, pour une proposition réjouissante, exigeante tout en étant populaire, de quoi ravir un public de 7 à 107 ans.
Fabien Rivière
Parterre, de Volmir Cordeiro, La Briqueterie - Centre de Développement Chorégraphique National (CDCN) du Val-de-Marne, Vitry-sur-Seine, dans le cadre du festival Excentriques (25/09 au 11/10), du 1 au 3 octobre, vu le 2 octobre. En savoir +
TOURNÉE :
— Mardi 7 et mercredi 8 octobre 2025 - Friche La Belle de Mai, Festival ActOral - festival des arts et des écritures contemporaines, Marseille. En savoir +
— 28 mars 2026 - Le Dancing CDCN (Centre de développement chorégraphique national), au Parvis Saint Jean, Dijon. www.ledancing.com
— Mardi 28 et 29 avril 2026 - Théâtre Olympia - CDN (Centre dramatique national) Tours avec le CCN (Centre chorégraphique national) de Tours. En savoir +
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