Affichage des articles dont le libellé est Fabrice Lambert. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Fabrice Lambert. Afficher tous les articles

samedi 29 mars 2025

La danse vitale de Fabrice Lambert (« Renverse »)

Renverse, de Fabrice Lambert, Photo Alain Julien
.
En 2020, le français Fabrice Lambert présentait Seconde nature, un quatuor (notre article La vitesse de Fabrice Lambert). Cinq ans plus tard il propose Renverse, pour huit interprètes, découvert lors de la Biennale de danse du Val-de-Marne. 

Autant Seconde nature, au demeurant excellent, est urbain, nocturne, digital, tendu, chimique, désespéré, autant Renverse est aérien, sinon cosmique, hors du temps, nature, sinon naturel, volontaire. La pièce débute dans un grondement la nuit, dont on ne sait ce qu'il présage. Les interprètes portent des costumes légers bleus, couleurs soutenues ou pastel, comme au printemps ou l'été. La danse est écrite, très riche mais toujours lisible. Le chorégraphe défend un engagement physique constant, un solide optimisme, l'émerveillement premier de l'enfant, de quoi faire ricaner les cyniques et les blasés, contrebalancé par les inquiétudes de la musique. Une écriture des corps tonique et bondissante, entre lignes droites, spirales et cassures. On doit assumer chaque instant pleinement, dans une jouissance du moment, intense, semble nous dire le chorégraphe. Le tout est une merveille de vitalité. 

À celles et ceux qui prétendent qu'une danse contemporaine exigeante ne peut pas être un art populaire, et que les salles sont vides, on répondra par un constat simple : au théâtre Jacques Carat à Cachan, comme quelques jours plus tôt au théâtre Jean-François Voguet à Fontenay-sous-Bois, on a croisé un public familial, de 7 à 77 ans, dans une salle quasi pleine, qui réserva un accueil triomphale à la pièce. C'est réjouissant.    
Fabien Rivière
Renverse, de Fabrice Lambert, vu le 14 mars au théâtre Jean-François Voguet à Fontenay-sous-Bois (en savoir +), et le 28 mars au théâtre Jacques Carat de Cachan (en savoir +), dans le cadre de la Biennale de danse du Val-de-Marne (notre présentation). 

— Témoignages de trois spectatrices, à Fontenay-sous-Bois : ICI 

TOURNÉE : mardi 1er avril - théâtre de Rungis. en savoir + 

— Fabrice Lambert est présent cette saison au théâtre Jacques Carat de Cachan. Il y est artiste associé pour les saisons 2025-2026 et 2026-2027.  

vendredi 16 octobre 2020

La vitesse de Fabrice Lambert (« Seconde nature »)

Seconde nature, de Fabrice Lambert, Capture d'écran Espaces Magnétiques 
.
Avec Seconde nature, vu hier soir au Théâtre de la Ville - Théâtre des Abbesses à Paris, Fabrice Lambert nous propose une œuvre d'une maturité inquiète mais nécessaire et courageuse. 

Les interprètes se déplacent constamment dans une nuit profonde éclairée artificiellement, et ne verront jamais le jour. L'espace est vide mais saturé d'une musique puissante et stellaire, avec un passage vers la techno à mi-parcours, et rempli jusqu'à la gueule de flashs stroboscopiques redoutables. Ils dansent souvent devant un mur d'images tout aussi artificielles, irréelles et saturées. On perçoit une existence qui se déploie dans un environnement gelé et hostile où le danseur - citoyen a cependant la puissance d'un brise-glace. 

On se demande comment ils font pour tenir. On voudrait s'approcher paisiblement, leur parler tranquillement, leur demander ce qui ne va pas, essayer de comprendre la situation, leur situation. On voudrait arriver à les faire au moins ralentir un peu ce flot, ce flux de folie. On rêve même de les faire stopper, d'arriver à les extraire de cet enfer terrestre. Grande naïveté certes.  

Ils ont la santé, comme l'on dit, et une singulière capacité de résistance. Jamais ils ne flanchent, ne soufflent, ne manifestent une quelconque fatigue ou lassitude. Jusqu'à une surprise finale, de taille. Inévitable finalement. Il n'est pas sûr qu'ils se posent beaucoup de questions. Il n'est pas sûr qu'ils le peuvent, pris sinon emportés par la vie. 

Ils sont quatre. Ils ne cessent de se croiser mais ne se rencontreront jamais. On ne peut pas vraiment appeler cela un collectif. Il n'y aura pas de prise de conscience, de questionnement, de protestation, de contestation de cet ordre terrestre. La contradiction n'est qu'apparente : on peut être ultra passif tout en étant ultra actif. C'est une tragédie sans pathos qui n'est pas sans élégance, vue le jour qui suit l'annonce de l'instauration d'un couvre-feu en France*.
Fabien Rivière
* Applicable de 21h à 6h pour six semaines, voir plus, à partir de samedi, dans neuf métropoles, soit 20 millions de français. 

Seconde nature, Théâtre de la Ville - Théâtre des Abbesses (Paris), du jeudi 15 au dimanche 18 octobre 2020. En savoir +